Aussi extraordinaire fût cette année 2020, il y a bien une chose qui n’a pas fait dans l’originalité : les incidents provoqués par la chasse à courre se sont enchaînés avec l’habitude qu’on leur connaît ! C’est là le triste constat que nous faisons saison de chasse après saison de chasse.
Pour conclure cette année si particulière, voici 8 temps forts de 2020 dans l’histoire de l’opposition à la chasse à courre !
1. UNE VAGUE DE VICTOIRES DEVANT LA JUSTICE
Dès la naissance de notre mouvement, les chasseurs à courre se sont empressés d’assigner leurs opposants devant la justice pour les affaiblir et les effrayer. Cette stratégie du “law fare” consistait à cultiver un véritable harcèlement judiciaire, les veneurs déposant délibérément des plaintes mensongères et vouées à l’échec. Malheureusement pour eux, leurs petits arrangements habituels se sont révélés inefficaces une fois dans les tribunaux…
Cette année a donc encore été marquée par des victoires symboliques : un référé contre 4 opposants pour “occupation abusive de la forêt” dans les Landes de Bréviande (37) a été rejeté, un juge a innocenté un opposant assigné pour “violence avec arme” par un cavalier dont la maladroite chute de cheval avait entièrement été filmée, le tribunal d’Amiens a reconnu la validité de l’interdiction de pratiquer la chasse à courre à moins de 400 m de la ville de Pont-Sainte-Maxence (60) malgré la demande de la Fédération de chasse de l’Oise… Des décisions historiques tant pour l’histoire de l’opposition à la chasse à courre que pour les tribunaux, les juges ayant dû se prononcer sur des demandes inédites ! Le mois de décembre 2020 a donc marqué la fin d’un acharnement judiciaire contre AVA ! Pour rappel, 9 chasseurs à courre et autres sympathisants ont été condamnés pour des faits de violence depuis 2018.
2. LA BARBARIE EN PLEINE VILLE
Le 31 décembre dernier, l’année 2019 se terminait avec un cerf réfugié sur le balcon d’un pavillon de Prémontré (02).
Malgré ses 3 mois de chasse en moins suite au confinement, 2020 n’a pas été en reste en terme d’incidents de chasse à courre. 5 jours plus tard, c’est à Quincy-Basse (02) qu’un cerf traqué trouvait refuge dans un jardin du village. Puis rebelote à Pont-Sainte-Maxence (60) deux semaines plus tard, sur l’île des Meules, en pleine ville. Le 1er février, c’est dans la même ville que la chasse à courre poursuit un cerf jusque dans le jardin d’un couple de retraités. Puis le même mois à Rivarennes (37), et parmi les chevaux d’une écurie dans les Landes (40).
Le confinement mettant fin à la chienlit, c’est le 1er jour de la reprise de chasse que les incidents reprennent, avec ce cerf réfugié en plein Compiègne (60) et sauvé par les habitants mobilisés. Puis, en décembre, c’est quatre jour après le nouveau déconfinement que les chasseurs à courre trouvent le moyen d’envahir un village avec leur meute, cette fois autour d’un étang privé de la Ferté-Milon (02) où leur proie tente désespérément de fuir à la nage.
La loi adoptée en 2019 qui incite à ne pas tuer les grands animaux chassés en ville n’aura été, comme nous le prédisions justement à l’époque, qu’un écran de fumée. Ces incidents sont parties prenantes de la chasse à courre et rien ne pourra les empêcher si ce n’est l’interdiction de cette pratique féodale.
3. LE DANGER SUR LES ROUTES CONTINUE
Tout automobiliste traversant régulièrement les zones forestières où la chasse à courre est pratiquée le sait : cette chasse pose d’énormes problèmes de sécurité routière !
Chaque année, des chiens de meute errants sont renversés (comme à Rambouillet le 04/01, à Fontainebleau le 01/02 et plus récemment sur l’A20 près de Châteauroux le 23/12), des voitures se prennent de plein fouet des animaux fuyant la chasse à courre (comme le 13/02 à Compiègne), des chevaux sans cavaliers se retrouvent sur les voies (comme le 15/12 dans l’Aisne sur la nationale), les routes sont systématiquement obstruées par une centaine de suiveurs en 4×4 et en vélo…
Mais c’est à quelques jours de la nouvelle année que les chasseurs à courre se sont surpassés : dans l’Aisne, des cavaliers et des suiveurs se sont rués sur la N2 (une 2 fois 2 voies limitée à 110 km/h) pour entourer la parcelle où avait fui un cerf !
Comme d’habitude, l’inconscience absolue des chasseurs à courre et de leurs suiveurs a fait courir un danger immense aux automobilistes, aux conducteurs de poids-lourds, aux chiens de meute, aux chevaux et aux animaux chassés…
Plus tôt dans l’année, la présence de chasseurs à courre, de suiveurs et de chiens a même été plusieurs fois signalées sur des voies ferrées où des trains passent toutes les heures ! Informée par la presse, la SNCF avait alerté la sécurité ferroviaire qui envisageait alors de porter plainte, ce qui n’a pas empêché les veneurs de récidiver.
4. L’INTERDICTION DE LA CHASSE À COURRE N’A JAMAIS ÉTÉ AUSSI PROCHE
Impossible d’envisager l’abolition de la chasse à courre sans volet politique à notre action, et ce domaine a été très animé cette année. Tout d’abord avec les élections municipales qui nous ont permis de sonder un grand nombre de candidats et de prendre des contacts un peu partout. C’est ce travail qui nous a posé en interlocuteurs pour conseiller des élus sur leurs options juridiques afin de protéger leur population. Des arrêtés municipaux ont déjà été pris à Choisy-au-Bac (60) et à Fleury (02) pour interdite le passage des équipages dans les rues, et d’autres communes ont fait appel à nos conseils pour des projets similaires à venir.
À la rentrée, c’est le Référendum pour les Animaux qui était sur toutes les lèvres et qui a permis de compter nos forces, malgré une tempête d’intox et de manœuvres des lobbies : le projet a réuni pas loin d’1 million de signatures.
Puis, la Proposition de Loi portée à l’Assemblée Nationale par Cédric Villani a marqué un moment historique, malgré son sabordage par le lobby chasse : pour la 1ère fois, l’abolition de la chasse à courre a été mise à l’ordre du jour parlementaire ! En face, quelques élus ont tenté de remettre au goût du jour un projet de “délit d’entrave à la chasse” pour tenter de criminaliser toute opposition à la vénerie, mais en vain pour le moment.
Les opposants à la chasse à courre ont pu cette année encore compter sur les députés et sénateurs qui se font depuis des années le porte-voie de leurs attentes et de leurs inquiétudes jusqu’au Gouvernement, qui se voit régulièrement interpelé sur les problématiques liées à la vénerie par le biais de questions écrites, de questions orales, de tribunes et de lettres aux ministres. Nos rencontres et nos échanges avec ces élus ont permis de resserrer encore davantage nos liens !
5. LA MOBILISATION POPULAIRE CONTINUE !
La situation sanitaire n’a pas permis cette année d’organiser nos manifestations annuelles de printemps, mais qu’à cela ne tienne : en forêt, la mobilisation a été plus que jamais au rendez-vous !
AVA est maintenant présente dans une vingtaine de lieux, avec des groupes autonomes portés le plus souvent par des habitants révoltés contre cette pratique barbare qui les envahit. La saison dernière, nous avons été plus de 500 à nous relayer dans les bois pour faire face à la chasse à courre et pour protéger nos villages, et cette saison 2020-2021, bien que tronquée par un nouveau confinement, a vu la mobilisation ravivée par des incidents de chasse inacceptables.
Le mouvement s’enracine de plus en plus dans les campagnes, là où cela est nécessaire !
6. LA PERPÉTUELLE IMPUNITÉ DES CHASSEURS À COURRE
La grande actualité de cette année 2020 a clairement été la situation sanitaire liée au Covid-19. En effet, dès la fin février, la population d’abord été confinée dans l’Oise (60), où se situait un foyer épidémique incontrôlable.
Mais rien n’arrête les chasseurs à courre, qui ont tout naturellement décidé d’aller chasser à quelques kilomètres de là dans l’Aisne (02), emportant avec eux des dizaines de suiveurs et potentiellement le virus chez leurs voisins axonais ! Mais le tollé de cette décision n’a pas suffi à les faire réfléchir : lors du second confinement en novembre, les habitants de l’Aisne et de l’Allier (03) ont cru halluciner en croisant les équipages en pleine action, réunissant chacun une centaine de personnes, protégés par des gendarmes, malgré une interdiction du Préfet !
Comme toujours dans ces situations, c’est une révoltante impunité que nous avons pu constater. Malgré les preuves irréfutables compilées par des témoins et des juristes, malgré une question écrite au gouvernement du député Bastien Lachaud, malgré les articles de la presse locale, malgré nos appels et nos relances aux services de l’État, aucune sanction n’a été prise, alors que des millions de Français étaient confinés chez eux et risquaient une amende de 135 € en cas de sortie.
C’est une facette bien connue de la chasse à courre qui se révèle avec clarté dans les moments de crise : ses pratiquants s’estiment au dessus des lois, et le sont sans aucun doute dans beaucoup de cas.
7. LES RAVAGES DE L’EFFET DE MEUTE
Un des aspects les plus néfastes de la chasse à courre qui a été révélé au grand public lors de cette année 2020, c’est indéniablement les ravages de l’effet de meute : cet instinct cultivé et exacerbé à outrance par les chasseurs à courre pour faciliter la traque, rend hors de contrôle une meute en l’espace de quelques secondes.
La mort tragique d’Elisa Pilarski, qui n’aura malheureusement pour la famille de la victime, pas trouvé sa conclusion cette année, a permis d’évoquer longuement un phénomène que les riverains des forêts ne connaissent que trop bien. Rien que cette année : en janvier, le Rallye Roumare perd le contrôle de sa meute, qui entre dans une ferme et poursuit les chiens du foyer. Le mois suivant, c’est dans l’Indre qu’un promeneur est poursuivi avec son chien par une meute de chasse à courre et doit se réfugier dans sa voiture, copieusement insulté par les chasseurs lui reprochant d’avoir perturbé leur loisir. Cet été, c’est un chien de meute de l’équipage du Marquis de Vibraye, à Cheverny, qui meurt, tué par ses congénères au chenil. C’est le 3ème drame similaire que vit ce chenil particulier pendant le confinement selon un employé anonyme. Puis, à la rentrée, nous apprenons qu’une meute de chasse à courre en Touraine a envahi un élevage de lamas, en dévorant un vivant devant la propriétaire désemparée. Voisine de l’équipage dans un petit village, celle-ci renoncera à porter plainte malgré le choc. La veille de Noël dans l’Indre, une meute traverse l’autoroute A20 à la poursuite d’un chevreuil et crée un triple carambolage. Cinq chiens meurent écrasés. Outre-manche, en Angleterre, c’est même un veau qui a été pourchassé dans sa pâture !
Malheureusement ces histoires nous remontent de partout en France et sont systématiques ! Quand une chasse à courre a lieu, les habitués savent qu’il vaut mieux mettre ses animaux de compagnie à l’abri.
8. LES ANIMAUX “OUTILS” TOUJOURS MIS EN DANGER
Pour les chiens de meute et les chevaux, chaque chasse apporte son lot de stress, d’épuisement et de dangers.
Cette année a commencé avec une scène qui a marqué les esprits dès le 25 janvier en forêt d’Halatte (60) : des cavaliers inconscients se sont obstinés à fouler des parcelles de forêt impraticables, résultat, un des chevaux s’est retrouvé pris au piège dans la vase jusqu’à la croupe ! Mais le danger s’étend au-delà des forêts, car les chasseurs à courre empruntent, traversent et frôlent constamment des routes limitées à 80 km/h. Dans ce contexte, rien d’étonnant à ce que des chevaux soient aperçus régulièrement affolés sur les routes, sans cavalier sur le dos, comme sur la N2 le 15/12 !
Les veneurs, bien souvent de piètres cavaliers, ne semblent pas avoir les compétences nécessaires pour pratiquer cette équitation à haut-risque comme on n’en voit nulle part ailleurs. À chaque chasse, les chevaux sont lancés à quelques mètres des voitures et des poids-lourds et affrontent ces dangers avec un robotisme déconcertant.
Tout comme eux, les meutes sont désensibilisées au monde extérieur à un point qui dépasse tout entendement. Car les chiens aussi arpentent les routes (et même les voies ferrées !) sans le moindre regard pour les voitures qui leur arrivent droit dessus… Les accidents sont donc malheureusement routiniers, comme nous l’expliquions précédemment, et cette année ne fit pas exception avec notamment la mort de ces 5 chiens sur l’A20.
Cette année, comme les autres, a permis de révéler la dangerosité et la cruauté de la chasse à courre, cette pratique pourtant rejetée par 82 % de la population ! (sondage IPSOS/One Voice 2018) Nous avons également été témoins de l’intolérable impunité dont profite les veneurs, parfois même de la protection de l’État et des institutions, et ce contre l’intérêt général. Néanmoins, cette terrible année qu’a été 2020 ne peut occulter l’avancée du mouvement d’opposition à la chasse à courre, tant dans les campagnes qu’au niveau politique !